La cession de bail au profit d’un descendant implique que le preneur-cédant ait eu un comportement respectueux de la loi.
Cour de Cassation, Civ. 3ème, le 25 octobre 2018, n° 17-14.073 :
Passé relativement inaperçu à l’automne 2018, cet arrêt rendu par le 3ème Chambre Civile de la Cour de Cassation le 25 octobre 2018 mérite un bref rappel, car il s’inscrit dans la droite ligne des précédentes décisions rendues depuis une dizaine d’années par la haute juridiction, et tendant à restreindre dans un chenal de plus en plus étroit les possibilités de cession familiale d’un bail rural.
Dans l’espèce soumise à l’appréciation de la haute juridiction parisienne, un couple d’exploitants agricoles, co-preneurs dans le cadre d’un bail rural depuis 1986, avait sollicité l’autorisation de céder leur bail à leur fils, une fois l’heure de la retraite arrivée.
Associés au sein d’une société à vocation agricole, l’époux co-preneur et le fils des co-preneurs travaillaient quotidiennement les biens loués, de même que l’épouse, co-preneur également, mais qui n’était pas associée au sein de la structure d’exploitation.
L’époux ayant opéré un retrait du GAEC en raison de problèmes de santé, l’épouse co-preneur était alors devenue associée en ses lieu et place, et cogérante du groupement avec son fils.
La société bénéficiait alors d’une mise à disposition.
Si cette mise à disposition légale ne peut en rien être assimilée à la cession prohibée prévue à l’article L. 411-35 du Code rural, la Cour de Cassation a eu à de nombreuses reprises l’occasion d’apprécier la régularité de cette mise à disposition non pas dans le cas d’une demande de résiliation de bail mais dans le cadre de la demande d’autorisation de cession du bail au descendant.
Cet arrêt, comme les précédents rendus en pareille espèce, a eu l’occasion avec une certaine rigueur de rappeler que le bien loué par des co-preneurs oblige ces deux locataires à être associés de la société qui bénéficie de la mise à disposition, et que si l’un d’eux venait à perdre cette qualité, cela serait constitutif d’une irrégularité justifiant un refus à la demande présentée par ces derniers d’être autorisés à céder le bail à l’un de leurs descendants.
En dépit de l’absence de tout préjudice pour le propriétaire bailleur, il sera donc opposé un refus à la demande d’autorisation de cession de bail, avec toutes les conséquences économiques que cela peut entraîner pour l’exploitation des preneurs et du candidat cessionnaire.
Dans une matière où les occasions de prendre à défaut un preneur peuvent être extrêmement limitées tant le statut du fermage est protecteur à cet égard, tout espoir de récupérer ces terres au moment du départ en retraite des co-preneurs n’est donc pas perdu.
On peut même s’étonner, dans le cadre d’un statut légal aussi protecteur, que la jurisprudence de la Cour de Cassation soit si rigoureuse. C’est pourtant là une position constante de la haute juridiction depuis une dizaine d’années.
Il faut donc retenir que pour obtenir l’autorisation de céder un bail à un descendant, 2 co-preneurs doivent prouver leur exécution de bonne foi du contrat de location, supposant, en cas de mise à disposition du bail à une société agricole, que les 2 co- preneurs aient été associés de manière concomitante au sein de la société bénéficiaire de la mise à disposition.